Dominique Borde signe une promenade nostalgique dans les années 1960 et 1970 et donne les premiers rôles à Alain Delon et Claude Sautet.
Bruno Corty
C´est la promenade d´un cinéphile dans une vieille désertée. L´époque ? Les années 1960 et 1970. Dominique Borde, ancien critique au Figaro, fait défiler pour nous un générique long comme un jour sans pain. Avec des chevaliers sans peur et sans reproche (Gérard Philipe, Jean Marais). Des cadors du polar, flingue en poche et verbe rare (Jean Gabin, Lino Ventura, Jean-Paul Belmondo). Avec des comiques au talent longtemps ignoré (Louis de Funès, Bourvil) qu´un certain Gérard Oury propulsa au sommet du box-office. Il évoque les carrières. les heures de gloire. Parfois, il s´attarde et l´on sait alors qu´il admire.
Alain Delon a toujours été l´une de ses passions. "Je crois que le cinéma est un vieux monsieur qui est en train de mourir, lui confie le guépard en 1999. Le siècle à venir sera celui de la télévision et du numérique. Il faut vivre avec son temps et quand on´a plus rien à faire : se retirer ! " Salutant cette lucidité, Borde ajoute : "Star est un métier de roi en effet, et quelque chose me dit qu´il n´a pas fini de régner, sans jamais vouloir admettre qu´un jour le roi est nu." Du samouraï à Melville, la transition est belle. Borde n´a jamais rencontré l´homme aux Ray-Ban et Stetson. Il l´a juste aperçu un soir de 1970, boulevard Montparnasse, sortant d´une Américaine avec deux pépées à ses bras. Comentaire ? "En quelques secondes, j´ai aperçu la légende en marche..."
"Des êtres profonds et fragiles"
S´il n´apprécie guère François Truffaut et Claude Lelouch, le critique salue Louis Malle qui adapta Le Feu Follet, "l´immense petit roman" de Drieu pour donner à Maurice Ronet un rôle à la mesure de son immense talent. Aussi dans son Panthéon : Claude Sautet, qu´il a rencontré en 1993, lors de la sortie d´Un coeur en hiver, son sublime avant-dernier film avec le couple Auteuil-Béart. L´auteur est frappé par "son allure et cette rigueur qu´il portait sur lui comme une armure, ultime protection des êtres profonds et fragiles". Et d´évoquer avec ferveur ses films des années 1970 qu´on a vus et revus et qui toujours nous envoûtent par leur petite musique fragile et leurs comédiens exceptionnels. Autre tempérament, Maurice Pialat. Borde l´a rencontré peu de temps avant sa mort. Il écrit joliment : "Une gueule ouverte qui parlait d´amour en poussant des cris de rage."
Ce livre ressuscite des images qui réchauffent, des visages qui touchent. Borde a raison, la nostalgie est une consolation. Avant que le rideau ne tombe, il nous donne envie d´entrer dans l´écran.
Le Figaro, 16 de março de 2010
Le Roman du Cinéma Français
Dominique Borde
Éditions du Rocher
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