La trilogie « Millénium », c'est comme l'ouverture des « Trois mousquetaires » : le quatrième est en route. En 2004, Stieg Larsson mourrait en laissant 320 pages dans son ordinateur portable, qu'il comptait fermement compléter. Cela n'avait rien d'un secret ; deux personnes étaient au courant.
Tout d'abord, Eva Gabrielsson, sa compagne de longue date qui avait étroitement collaboré à l'écriture de la trilogie - des trois premiers volets, devrait-on dire. Elle s'était jusqu'à présent efforcée de laisser planer le mystère autour de ce précieux manuscrit, déclarant d'abord qu'elle avait l'ordinateur en sa possession, avant d'affirmer qu'elle ignorait où se trouvait le texte. Dans tous les cas, Eva Gabrielsson refuse l'idée d'une publication avec la détermination d'une femme endeuillée et ne veut pas dévoiler le contenu de cette fameuse suite.
Mais John-Henri Holmberg, lui aussi, savait. Il en savait un peu moins, mais pouvait en dire un peu plus. Stieg Larsson et lui étaient amis depuis les années 1970. Ils s'étaient rencontrés dans une convention de science-fiction, comme beaucoup de gens qui sont devenus amis dans les années 1970. En 2004, son vieux copain millénariste lui avait envoyé un mail, dans lequel il donnait quelques informations sur ce travail en cours.
« L'histoire se déroule à 120 kilomètres de Sachs Harbour, sur l'île de Banks (nord du Canada) au mois de septembre », révèle Holmberg. Si on en croit le message, transmis à Associated Press, Larsson avait abattu un travail de documentation assez considérable sur la région. Le crépusculaire écrivain suédois écrivait ainsi :
« Savais-tu que 134 personnes vivent à Sachs Harbour, et que leur seul contact avec le monde est un avion postal qui passe deux fois par semaine quand le temps le permet ? Mais il y a 48.000 bœufs musqués, 80 types de fleurs sauvages qui éclosent en deux semaines au début du mois de juillet, et environ 1.500 ours polaires. »
Aux Etats-Unis, 50.000 exemplaires de « Millénium » se vendent chaque jour
Holmberg n'en sait pas plus, mais assure que Larsson devait avoir un plan qui permettrait de terminer l'histoire. De quoi faire saliver un bon nombre d'éditeurs, à commencer par le suédois Norstedts. Bien que les ventes se tassent en Europe (en France, le tome 1 entamera une seconde carrière en poche à compter de septembre), la vague Millenium bat son plein aux Etats-Unis. 50.000 exemplaires de la trilogie se vendent chaque jour. Le film tiré des « Hommes qui n'aimaient pas les femmes » marche très bien, sur un marché d'ordinaire fermé aux productions scandinaves. Un remake hollywoodien est d'ailleurs en cours de tournage.
Alors, stop ou encore ? Chez Norstedts, on juge la question « entièrement hypothétique ». « Nous n'avons jamais étudié ce manuscrit, nous ne savons donc pas s'il existe, à quel stade d'écriture il en est et dans quel état il se trouve », déclare la directrice de la maison, Eva Gedin. Jointe par AP, une marketeuse de chez Barnes & Noble juge que l'idée pourrait être bonne, si les écrivains chargés de la finition parviennent à « capturer la voix de Larsson ». Pour que Barnes & Noble en vienne à évoquer, dans la lignée d'un Pierre Brunel, une théorie vocaliste des constructions littéraires, il y a fort à parier que l'affaire pourrait être juteuse.
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